jeudi 19 juin 2008

Apocalypse Now

Depuis longtemps, on parle de crise alimentaire. Sauf qu’aujourd’hui, les mots ont changé. Avant, on parlait d’inégalité dans la répartition de la nourriture. Ce qui signifiait que les pays riches avaient des surplus et que les pays pauvres étaient prêts à faire n’importe quoi pour une bouchée de pain. En tant que citoyen de pays riche qui trouve ça bien triste, mais qui ne veut pas partager, on pouvait faire un petit don et se goinfrer. De toute façon, le système est fondé sur cette prémice; «Pour qu’il y ait un surplus quelque part, il doit y avoir un manque ailleurs».

Est-ce un soulagement de me dire que je fais partie des pauvres de mon pays riche? Du point de vue de mon mode de pensées, développé à travers un historique judéo-chrétien : absolument! (Je vais gagner mon ciel)

Aujourd’hui, on parle de pénurie.

Est-ce un soulagement de me dire que je fais partie des pauvres de mon pays riche? Du point de vue de mon éducation capitaliste néo-libérale : bien au contraire! (Je vais vivre l’enfer).

Le pire est que tout le monde sait jusqu’où peut aller quelqu’un d’affamé. Je vais vous le dire moi jusqu’où j’irai.

D’abord, grâce à mon côté solidaire et éprise de justice sociale, je vais me joindre à des groupes pacifiques pour revendiquer le droit de manger pour tous, en criant des slogans remplient d’amour et d’espoir. Cette vague de chaleur humaine aura son effet un certain temps, mais sera vite diluée par les tremblements d’une récession, une de plus.

La pénurie gagnant du terrain, le groupe resserra ses rangs et adoptera une politique plus forte. Je deviendrai alors une justicière masquée. Je volerai aux riches pour redonner aux pauvres. Héroïne pour le uns, mais paria pour le autres. Je devrai vivre cachée et ne plus avoir de contacts avec les membres de ma famille et mes amis afin de les protéger d’éventuelles représailles.

La pénurie devenue critique, seuls les plus extrémistes demeureront au sein du groupe. Les membres tenteront vainement de s’approprier le pouvoir en commettant des actes terroristes symboliques. À partir de ce moment, ceux qui y trouveront quelques intérêts continueront d’appuyer le groupe. Certains, trahies, formeront d’autres groupes similaires.

Quant à moi, sous l’emprise de certains principes moraux, je me dissocierai complètement de ce groupe, pour cause de conflits dans nos visions respectives concernant la raison d’être du groupe. Je me retrouverai donc seule, à survivre, selon le dictat de la majorité silencieuse : «Chacun pour soi».

Pauvre et affamée, j’aurai deux choix : devenir une criminelle notoire ou me laisser mourir. Je commencerai donc par commettre quelques vols. Endurcie par quelques séjours en prison, je me tournerai vers la prostitution. N’ayant plus rien à perdre, je finirai par tuer sans remords. Comme sentence, on me servira comme repas principal dans un foyer pour orphelins.


Mais noooooon, voyons! Tout ça n’arrivera pas! Je ne suis pas si pessimiste, franchement! Vous me connaissez mal!


En fait, envahie par un profond désespoir créée par une impression d’un monde futur chaotique, je vais remettre en question toutes les bases de mon identité. Rien de moins. Parce que je suis célibataire, sans enfants et sans emploi qui pourrait donner un sens à ma vie, je peux me permettre ce genre de chose.

Je suis certaine que cette douloureuse réflexion ne se fera pas en testant toutes sortes de drogues. (Ouf!!! Au moins ça!) Quoiqu’il en soit, enfin, je rencontrerai Dieu et je vais me convertir à l’Islam.

Sous mon foulard je serai à l’abri de l’animal en l’homme. Je me ferai même excisée pour ne plus être sous l’emprise de mes pulsions sexuelles incontrôlables et retrouver un équilibre psychologique. Je serai soulagée que le monde soit gouverné par des hommes aux cheveux courts qui sont en lien direct avec Dieu. Parce que mon Dieu sera un Dieu d’amour et de compassion pour tous ses fidèles. Je n’aurai plus rien à craindre, car j’en ferai partie des fidèles. Dans un élan d’amour total, peut-être (et je dis bien peut-être) que je deviendrai martyre pour me retrouver entourée de jeunes vierges au paradis.

(…)

Ça marche pour les femmes, cette histoire de vierges au paradis?




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